The Last of Us Part II : Naughty Dog aborde le processus de création des options d’accessibilité du jeu

Tandis que la question de l’accessibilité des jeux vidéo devient de plus en plus centrale au fil du temps, The Last of Us Part II entend faire en sorte qu’aucun joueur ne soit dans l’incapacité d’aller au bout de l’aventure, quelle qu’en soit la raison. Deux développeurs de Naughty Dog, Emilia Schatz et Matthew Gallant, nous présentent ainsi le travail effectué au sein du studio à ce sujet.

Véritablement au cœur des considérations du côté de chez Xbox depuis plusieurs années, le thème de l’accessibilité pour tous dans le jeu vidéo est un peu moins mis en valeur du côté de chez Sony. Pourtant, cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’est pas pris en compte, bien au contraire. D’ailleurs, Naughty Dog nous le prouve aujourd’hui en évoquant le sujet sous le prisme de The Last of Us Part II, dans les colonnes de The Verge.

Une bouteille à la mer…

Selon Emilia Schatz, lead gameplay designer sur la suite de The Last of Us, tout a commencé lorsque les équipes ont reçu le courrier envoyé par un joueur. Ce dernier y expliquait qu’il n’avait malheureusement jamais pu aller au bout d’Uncharted 2: Among Thieves, la faute à la phase de QTE finale nécessitant d’appuyer rapidement sur une touche à répétition.

Uncharted 2
L’affrontement Nate/Lazarevic implique des phases de QTE

Cette lettre, qui a éminemment touché les développeurs, a alors poussé le studio à réfléchir davantage sur la question de l’accessibilité pour ses prochaines productions. Bien que cela ait pris un peu de temps à se mettre en place, un premier pas a été effectué lors du développement d’Uncharted 4: A Thief’s End, pour lequel ils avaient un « plan très simple » : ne pas reproduire les mêmes erreurs.

Pourtant, comme l’explique la développeuse, les options d’accessibilité proposées au sein du jeu étaient encore « assez rares » à ce moment-là. Mais cela n’a pas empêché la communauté des joueurs de les recevoir avec beaucoup de joie, ce qui a définitivement motivé Naughty Dog à mettre la question au cœur de ses préoccupations pour la production de son dernier jeu en date, à savoir The Last of Us Part II.

Dans Uncharted 4, nos options d’accessibilité étaient en fait assez rares. Mais nous avons reçu beaucoup d’éloges de la communauté pour cela, et nous avons ressenti cela comme si nous avions eu un énorme succès avec un très petit nombre de choses réalisées.

L’accessibilité au cœur du développement de The Last of Us Part II

Comme annoncé par Neil Druckmann lors du State of Play du 27 mai dernier, la suite des aventures d’Ellie et Joel proposera les environnements les plus vastes jamais créés dans le cadre d’un jeu du studio. Le joueur sera libre d’explorer de grandes zones à plusieurs moments de l’aventure, ce qui représente autant de potentiels problèmes d’accessibilité pour certains joueurs en situation de handicap.

Pour pallier ce problème, les équipes ont ainsi décidé de se confronter à la question le plus tôt possible au cours du développement. Matthew Gallant, game designer, explique qu’il s’agit d’un travail de longue haleine ayant commencé dès 2017, avant d’ajouter que beaucoup d’options n’auraient jamais pu voir le jour s’ils n’avaient pas bénéficié de tout ce temps pour pouvoir les implanter. Pour cause, certaines d’entre elles ont nécessité un important travail d’adaptation.

Pour ce faire, Naughty Dog n’a pas hésité à travailler en collaboration avec des personnes spécialisées sur le sujet de l’accessibilité. Ils ont également discuté avec d’autres développeurs, rencontré des joueurs et réalisé de nombreux tests afin d’être certains que chacune des options soit intégrée de la meilleure façon possible au sein du jeu.

Une expérience entièrement personnalisable

Tout ce travail a alors fait de The Last of Us Part II le jeu le plus avancé de Naughty Dog en termes d’accessibilité. En effet, Schatz explique que leur nouvelle production propose pas moins d’une soixantaine d’options différentes permettant de personnaliser son expérience de jeu selon des critères très variés : contrôles du personnage, aides visuelles, indices sonores, navigation, combats, interface utilisateur, absolument tout peut être modifié au besoin en passant par les menus.

En plus des options les plus classiques, que l’on retrouve dans beaucoup d’autres jeux à l’heure actuelle, elle évoque ainsi par exemple la possibilité de zoomer sur l’écran avec le pavé tactile afin de voir de plus près certains éléments, d’activer des indices sonores pour indiquer la présence d’objets à ramasser ou de rebords sur lesquels grimper, de modifier les contrastes du jeu en fonction de son handicap visuel ou encore de bénéficier d’un assistant vocal capable de lire n’importe quel élément de texte tout au long du jeu.

Pour eux, tout a été fait afin d’éviter que le problème rencontré par certains joueurs sur leurs précédents titres, à l’image de l’auteur de la lettre concernant Uncharted 2, ne puisse se reproduire dans le cadre de The Last of Us Part II. Chaque personne qui se lancera dans l’aventure devrait ainsi être en mesure d’en voir la fin.

Pour nous, l’accessibilité consiste à enlever les barrières qui empêchent les joueurs de compléter un jeu. Il ne s’agit pas de simplifier un jeu ou de produire un jeu facile. De quoi nos joueurs ont-ils besoin pour aborder le jeu de la même manière que n’importe qui d’autre ?

Une mise en place compliquée

Néanmoins, tout cela n’a pas forcément été facile à mettre en place. À l’origine, Naughty Dog n’avait par exemple pas prévu de proposer un menu aussi fourni d’options, que certains pourront qualifier d’étouffant. Ils envisageaient plutôt une série de modes prédéfinis selon plusieurs critères mais les personnes avec qui ils ont collaboré leur ont fait comprendre que ce n’est pas ce que les joueurs attendaient. Si cette approche reste malgré tout présente, ils voulaient avant tout être en mesure de manipuler eux-mêmes chacune des options afin de mettre en place leur expérience idéale.

Plus encore, Schatz explique que certaines des options en particulier ont nécessité un gros travail de réflexion afin de rester cohérentes avec l’univers et le propos du jeu. Elle évoque par exemple le mode contraste élevé, conçu pour les mal-voyants, qui modifie drastiquement le visuel du jeu pour rendre certains éléments plus facilement identifiables. Tandis que le décor devient gris clair, les personnages alliés sont colorés en bleu, les ennemis en rouge, les objets en jaune, etc.

The Last of Us Part 2 Contraste Mode
Pour l’anecdote, ce mode a été inspiré par le filtre « Vision de voleur » (« Thief Vision ») d’Uncharted 4

Le problème, c’est que cela les a parfois confrontés à des problèmes vis-à-vis du scénario. The Last of Us Part II mettant en scène une vision non-manichéenne des événements, de quelle couleur colorer les personnages les plus ambivalents sans pour autant trop en révéler non plus ? Comment rendre cela possible avec un tel mode ? Comme l’expliquait Gallant un peu plus haut, tout cela n’aurait pas été possible sans le temps dont ils ont bénéficié pour mettre en place ces différentes options.

L’un des thèmes principaux du jeu est le gris au milieu, à savoir qui est un ami et qui est un ennemi. Surtout à certains des moments les plus ambivalents de l’histoire, lorsque quelqu’un peut être l’un ou l’autre, quelle couleur devons-nous leur appliquer à ce moment-là ? […] Il y avait beaucoup de subtilité à régler à cause du ton de notre jeu.

Espérons que cela suffira à permettre à tous les joueurs de vivre cette nouvelle aventure dans les meilleures conditions possibles.

Pour rappel, The Last of Us Part II est attendu pour le 19 juin prochain en exclusivité sur PlayStation 4.

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