Interview | Nicolas Deneschau, auteur de Décrypter les jeux The Last of Us : Que reste-t-il de l’humanité ?
À l’occasion de la sortie du nouveau livre de Nicolas Desneschau sur The Last of Us, disponible chez Third Editions, j’ai pu m’entretenir avec l’auteur. Nous avons discuté de ses références, son rapport à la saga, de l’ambiance post-apocalyptique du confinement de Mars 2020. L’interview a été possible grâce au blog Insert-Coin crée par Anthony Cocain.
Naughty Dog Mag’ : À quel moment t’es-tu mis à l’écriture ?
Nicolas Desneschau : Ça remonte maintenant. C’est venu lors l’avènement du web, à sa genèse je fais parti des anciens geeks *rires*. On a trouvé un nouveau média d’expression grâce à Internet et rapidement on a vu que c’était une plate-forme libre. Ensuite, j’ai participé à plusieurs sites web en simple amateur. Plus tard, on a créé collectivement un site internet qui s’appelait Cinégenre, début 2000 jusqu’en 2007. Parallèlement, je participais à plusieurs médias comme le site Madmovies , Indélaser. Il y avait plusieurs plate-formes sous formes de participation en amateur ou en piges.
Fin 2000 il y a eu de gros acteurs, il y a eu plus de professionnalisation. À ce moment-là j’ai un peu plus lâché… Mais je m’intéressais toujours au jeu vidéo sur des plates-formes qui m’intéressaient comme Grospixel et Merlanfrit. Aujourd’hui, je considère que ce sont des regroupement des plus belles plumes du jeu vidéo. C’était une pouponnière de différentes plumes qui essayaient d’analyser autrement le jeu vidéo. C’était exigeant en termes d’écriture et très formateur. Je suis arrivé par là.
Au moment où j’ai commencé à écrire de manière plus régulière, j’ai rencontré Bruno Provezza qui est auteur. Il avait participé au livre sur Resident Evil de Third Editions et Web Master à Mad Movies. C’est un copain, qui m’a invité à écrire le livre Uncharted avec lui.
NDM’ : Parlons maintenant de The Last of Us. Quel a été ton ressenti sur le 1er opus quand tu as fini le titre ?
ND : Pour moi ce fut déjà la suite d’une démarche qu’avait prise Naughty Dog. À partir du premier Uncharted, on sent qu’ils ont trouvé une formule maîtresse, c’est-à-dire un TPS mixant l’aventure et le blockbuster cinématographique. TLOU, c’était la 1ère étape de l’aboutissement de cette formule sur PS3. Le scénario, à l’époque le jeu était exceptionnel, un travail sur les personnages, le jeu d’acteur qui fait la différence sur le titre de Naughty Dog. C’est cette impression que j’ai eu en jouant à The Last of Us plus que de visiter un univers original, TLOU est loin d’être original.
NDM’ : Quel a été le déclic du projet du livre « Décrypter le jeu : The Last of Us » ?
ND : C’est un projet de longue date chez Third Editions. C’était une évidence, ils ont des spécialités avec Final Fantasy ou Resident Evil, les grandes franchises du JV. Ils les ont écumées ! Vu le succès de TLOU.
A l’époque du livre sur Uncharted, en 2018, il était déjà évident qu’il y allait avoir un bouquin sur The Last of Us. Ensuite j’ai entamé un projet très personnel sur Monkey Island, c’est où j’avais envie d’écrire. Puis je suis parti sur un autre livre qui était un gros challenge et un risque sur la franchise Godzilla. Entre temps des personnes ont commencé à écrire un livre sur TLOU. Début 2020, Third Editions est revenu vers moi : la première personne qui s’occupait du projet ne pouvait pas et avait des projets. Ils m’ont demandé si je voulais m’en occuper.
NDM’ : Le confinement de Mars 2020 t’a-t-il aidé à la mise en chantier du livre ?
ND : J’ai eu beaucoup plus de temps pour m’y pencher. Et en plus il y avait une ambiance post-apo, où il n’y avait personne dans les rues. Il y a quelques thématiques qui ont émergées avec le confinement. Ça été un gros marathon entre la recherche documentaire sur les deux épisodes, la rédaction pure et dure, l’année 2020 fut intense pour l’écriture du livre avec en plus la sortie de The Last of Us Part II, j’étais bien occupé.
NDM’ : Que retrouve-t-on dans le livre ?
ND : C’est une espèce de commentaire écrit des deux jeux, ce qu’il s’y passe. On raconte énormément de choses, de quoi parlent les auteurs des deux titres mais surtout la manière dont ils manipulent nos émotions.
Rien n’est laissé au hasard, je l’explique dans le livre. Par exemple, Naughty Dog a développé des mécanismes narratifs et émotionnels pour nous faire ressentir à des moments très précis du jeu. Prenons l’introduction du premier jeu par exemple. Si on contrôle Sarah, la fille de Joel au tout début, puis peu de temps après on change avec Joel, c’est à la base une volonté des créateurs, c’est une mécanique que Naughty Dog a pioché dans d’autres inspirations.
Ce qui m’a amusé dans le livre, et c’est le fil conducteur, c’est que Neil Druckmann se revendique d’une école d’écriture cinématographique de Robert McKee, qui a écrit un nombre d’ouvrages qui permet de structurer un récit et de manipuler le lecteur ou le spectateur. Et dans le livre je m’amuse a glisser les conseils de McKee sur l’art de manipuler le joueur.
NDM’ : The Last of Us Part II a fait débat, qu’est-ce que tu en as pensé ?
ND : C’est un jeu clivant, mais c’était le postulat de base. On se retrouve avec un AAA d’auteur qui est lent, il prend son temps avec un rythme particulier et fait frustrer le joueur. Je l’explique dans le livre : des personnes ont refusés en plein milieu de jeu d’aller plus loin. De façon subjective, j’ai trouvé que c’était un pari très intéressant. TLOU II marque un précédant comme l’a été le 1er opus.
Par exemple après TLOU, on s’est trouvé avec des titres qui, narrativement, avaient placé la barre très haute, que ce soit des jeux indépendants ou des AAA. Suite au succès de The Last of Us, c’est devenu une volonté de Sony de proposer des jeux narratifs comme God of War ou des expériences comme Death Stranding. Ça a eu une importance et des conséquences sur les jeux AAA.
NDM’ : As-tu un personnage que tu préfères dans la saga ?
ND : C’est compliqué ! Il y a plein de personnages intéressants. Quand tu sors du deux, je trouve que c’est celui d’Abby. C’est la personne que tu es censé détester… Encore une fois, il y a un travail de marionnettiste de Naughty Dog pour te retourner complètement. C’est extraordinaire, il y a une vraie mécanique. Ce personnage ne part de rien, elle a un chemin plus positif qu’Ellie. C’est elle qui donne foi en l’humanité.
NDM’ : Quel est ton moment préféré dans le jeu ?
ND : Dans le premier épisode, la scène où Ellie est amenée chez le frère de Joel, Tommy. Ils sont attaqués, elle va se réfugier dans un chalet dans lequel elle va lire le journal d’une adolescente. Joel la rejoint. Il va y avoir confrontation entre les deux.
Joel lui dit clairement qu’Ellie ne sera jamais sa fille et qu’il faut qu’elle arrête de la considérer comme sa fille. Ce dialogue est très bien écrit. Je trouve qu’il résume bien la qualité d’écriture du jeu ; en très peu de phrases et grâce à la qualité du jeu d’acteur, tout est dit. C’était nouveau à l’époque.
NDM’ : Nicolas, je te pose la question qui est sur la couverture… Que reste-t-il de l’humanité ?
ND : Je le révèle dans l’avant-dernier chapitre du livre, j’essaie d’amener le lecteur tout le long du livre de manière plus ou moins subtile. Cette question peut paraître naïve… On essaie de circuler dans toutes les thématiques jusqu’à arriver à une révélation finale *rires*.
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1 Commentaire
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[…] que Žbanić nous offre une séquence totalement inédite. En tout cas, selon l’auteur Nicolas Deneschau, qui signait récemment Décrypter les jeux The Last of Us. Que reste-t-il de l’humanité ?, […]